13 juin 2011

Interview: HOLSTENWALL

copyright photo: Gwenaelle Colin

On pensait réellement que la scène musicale française n'avait plus rien à nous offrir après toutes les horreurs qui sont sorties ces derniers jours (oui, je fais allusion à la gourde de Secret Story et son "truc de ouf"). Niveau rock, on s'était un peu perdus il y a quelques années avec les bb rockeurs mais il semblerait que la scène parisienne n'ait pas dit son dernier mot. Pendant que les Naast et autres occupaient le devant de la scène, des groupes avec un réel talent s'entrainaient dans l'ombre. C'est le cas pour Holstenwall, quatuor parisien de post-punk, qui n'ont pas fini de faire parler d'eux avec la sortie de leur EP 'Podium #3' chez Third Side Records (que vous pouvez commander ici). Entretien avec trois des membres du groupe...

1/ Comment ça va par cette chaleur ? Vous êtes prêts pour ce soir ? [ndlr : Ils jouaient à la Flèche d’Or]
Camille : Ca va, même s’il fait chaud on est carrément prêts ouais.

2/On a reconnu l’origine de votre nom [ndlr : Holstenwall est la ville dans lequel se déroule le film Le Cabinet du Dr Caligari] et du coup on voulait savoir ce qui vous intéressait dans l'expressionnisme allemand. Est-ce que vous vous en sentez proches ?
Camille : Déjà à la base c’est très difficile de trouver un nom de groupe. Je sais pas comment on en est venu à tous se mettre d’accord sur ce point là. Je pense que ce qui nous intéresse là-dedans c’est tout ce qui tourne autour de l’atmosphère, de l’ambiance et notamment dans le Cabinet du Dr Caligari les décors de la ville nous ont vraiment troublé parce que c’est censé être le reflet de la personnalité des gens qui y vivent. On trouvait ça intéressant cette idée de « ville monde », « ville d’esprits ». On a voulu faire de la musique qui soit considérée comme un reflet de cette « ville monde ».

3/Comment définir votre musique en trois mots ?
David : Acide
Camille : Moi je dirais marécageuse, une espèce de vase tu vois. Tu prends de l’acide dans un marécage plein de vase.
Antoine : Du béton.

4/ Qu’est ce qui vous a donné envie de faire de la musique ?
Antoine : C’est une question dure là…
Camille : Je sais pas… Pour moi c’est venu naturellement. Je viens d’une famille où tout le monde fait de la musique et j’étais le seul à ne pas en faire, peut-être pour emmerder le monde.
David : Moi c’était plus une alternative à la parole, c’est un mode d’expression différent. C’est aussi une façon d’exprimer ce que je peux ressentir et que j’arrive pas forcément à dire autrement.
Antoine : C’est plus un besoin d’équilibre en fait par rapport à tout ce qui peut m’arriver dans ma vie, c’est un moyen différent de dire les choses.
Camille : Pour tous les trois c’est naturel en fait.

5/ Pour en revenir au thème de l’expressionisme allemand, est-ce que vous vous sentez proches de l’univers de groupes londoniens du style Horrors, Factory Floor, O Children, etc ? On s’était vraiment intéressées à eux et dans votre musique on a l’impression de retrouver des points en commun.
Antoine : Bah déjà les O Children on les connait un peu au niveau humain donc ça fait déjà un lien. On a beaucoup écouté le deuxième album des Horrors et puis c’est vrai qu’il y a des similitudes mais c’est pas parce qu’on a voulu faire la même chose, c’est juste qu’on trouve des choses similaires dans notre façon de composer.
David : Moi le côté production m’a vachement surpris sur le dernier album des Horrors, et même sur celui d’O Children, parce qu’ils ont été bien entourés. Je me suis rendu compte que c’était hyper important d’avoir d’autres personnes autour de nous. La production d’un album, comme pour nous avec la production de l’EP, c’est pas qu’un travail de composition, y’a les arrangements aussi, ça ne peut pas être produit par n’importe qui.
Antoine : C’est pas juste des compositions ni des accords, c’est tout un travail sur l’ambiance sonore et l’univers.
Camille : Après si on fait partie de la même scène je pense pas, j’ai jamais eu l’impression qu’on fasse partie d’une scène. Mais en tout cas c’est clair qu’au niveau de la production on se sent plus proches d’eux que d’autres groupes français. Moi je trouve ça génial qu’il y ait plusieurs groupes dans le monde qui s’intéressent à cette atmosphère, à ce genre d’ambiance un peu glauque.
Antoine : Et justement on nous a déjà fait la remarque qu’on ne sonnait pas forcément français et on est plutôt contents de pouvoir se détacher de tout ce qui peut se faire en France. Les gens se posent beaucoup moins la question de savoir si un groupe est américain ou anglais, ils s’intéressent directement à la musique tandis qu’en France c’est différent, les gens se disent « ah un groupe français ». C’est pas qu’on essaye d’avoir le même statut mais on veut être considérés plus par ce qu’on fait que de là où on vient.

6/ Si vous pouviez jouer avec un artiste, mort ou vivant, ce serait qui ?
Camille : Moi je dirais John Cage parce qu’il avait une vision de la musique, de l’art complètement malade, surtout au niveau de l’expérimentation.
Antoine : Alan Vega.
Camille : Ouais mais Alan Vega il est pas mort !
Antoine : Mais la question c’est mort ou vivant. T’es tout de suite dans le morbide toi ! (rires)
David : Euh je dirais Robert Wyatt.
Camille : Et Prince aussi. En fait j’hésite entre John Cage et Prince, je pourrais faire un énorme groupe avec John Cage, Prince, Robert Wyatt et Alan Vega. Ce serait mortel n’empêche ! (rires)

7/ On a vu que vous aviez tourné un peu à Londres et Berlin. Qu’est-ce que vous pouvez nous dire sur les publics étrangers ? Qu’est-ce que vous préférez au niveau de l’ambiance ?
Antoine : Euh c’est même l’ambiance au niveau de la ville qu’on préfère par rapport à Paris. On est toujours surpris par l’accueil à l’étranger parce qu’on s’est habitués à être mal reçus à Paris.
Camille : Ouais, à chaque fois qu’on joue à Berlin on est un peu comme des princes. Même au niveau de l’ambiance de la ville c’est vraiment pas comme à Paris, y’a aucun stress et du coup on arrive sur scène complètement détendus. Je pense pas que ce soit lié au pays mais plus à l’état d’esprit des gens, si à Paris on avait un état d’esprit plus cool, plus détendus et moins dans le jugement, je pense que ça se passerait mieux.

8/Est-ce que vous avez le souvenir d’un pire concert ?
David : Pire concert ou pire ambiance de concert ?
PE : Comme vous voulez.
Camille : Je pense que David c’est la mémoire du groupe.
David : (il réfléchit) Bah y’en a plusieurs en fait. Là où on a été le moins bien reçu ça devait être à Londres je pense et le pire concert qu’on ait fait à Paris c’était au Be There, c’est la seule salle de concert sur l’Ile Saint Louis, et c’est une blague, vraiment une grosse blague.
Camille : Ouais mais le problème de Londres c’est que y’a toujours 4000 soirées en même temps et du coup les gens sont un peu divisés.
Antoine : En même temps à Londres la musique c’est surtout un business, n’importe qui peut organiser une soirée pour se faire de la thune. C’est ça qui est différent à Berlin, les gens ne cherchent pas forcément à se faire de la thune. A Londres on avait été payés £20, ce qui est assez peu, et on faisait le déplacement par nos propres moyens.
Camille : Je pense qu’on s’attendait à mieux mais bon quand on y retournera ce sera différent.

9/ Notre webzine s’appelle Psychedelic Electric…
Camille : Tu vas nous demander si on est plutôt Psychedelic ou Electric ?
PE : Bon bah t’as cassé la question, merci !
Camille : Non mais on la refait, vas-y ! (rires)
PE : Alors, Psychedelic ou Electric ?
Holstenwall : Bah on est carrément Psyche !!
David : Moi je dirais quand même Electric…
Antoine : Ah ouais pourquoi ? Vas-y développe !
David : Les 2/3 sont Psychedelic alors moi je suis Electric
Camille : C’est le bon cocktail alors, 2/3 de Psychedelic et 1/3 d’Electric.

10/ Qu’est-ce que vous écoutez en ce moment ?
Camille : En ce moment j’écoute pas mal de Factory Floor.
Antoine : Moi j’écoute la démo d’un groupe parisien, des potes à moi, c’est vachement bien. C’est un peu dans la veine d’Animal Collective mais bon, ce serait réduire ce qu’ils font à du Animal Collective. C’est un peu difficile à décrire alors il vaut mieux l’écouter pour se faire une idée.
David : Bon bah puisqu’on fait de la pub pour les potes, moi j’écoute Mister Soap & The Smiling Tomatoes, ils ont pris un virage un peu lounge, c’est pas mal.
PE : Vous avez un peu tournez notre question en promo pour les potes là pour le coup !
Camille : Moi j’ai pas fait de promo hein, je fais ce qu’on me dit ! (rires)

11/ Pour en revenir à l’EP qui vient de sortir, quelles sont vos influences dessus ?
Camille : Est-ce que vous l’avez vu ?
PE : Non pas encore…
Camille : Aaaah alors vous ne pouvez pas en parler sans l’avoir vu ! (Il nous tend un EP)
PE : Ah ouais la classe, pas mal le vinyle transparent !
Camille : On fait ça parce qu’on est super fiers, on est un peu comme des gosses.
PE : Donc pour en revenir à ce magnifique EP, quelles ont été les influences ? On sent quand même une évolution dans votre musique.
David : Oui c’est clair ! Déjà pour cet EP on était un peu plus à travailler dessus, les gens du studio nous poussaient à nous dépasser.
Camille : Et puis on nous a laissé un peu plus de temps. Quand tu enregistres quelque chose en urgence t’as un peu plus d’énergie mais y’a toujours quelque chose auquel tu avais pensé que tu ne peux pas enregistrer. Là, on a fait ce qu’on voulait vraiment, on a mis des enregistrements de piano, c’était génial ! En fait, là où ça a changé c’est qu’on a vraiment visualisé l’EP comme si c’était un album sans forcément aller jusqu’au concept d’album mais imaginer un cheminement avec un début et une fin, avec différentes variations, différentes intrigues.
David : Au niveau des influences je sais pas s’il y en a vraiment mais au niveau des sonorités j’ai essayé d’avoir une vision différentes pour les 4 titres qu’on a fait. Et puis étant donné qu’on avait la possibilité de faire beaucoup de choses ça nous a permis de créer des ambiances particulières à chaque fois. Pour les 4 titres la hiérarchie était complètement différente et c’est assez intéressant je trouve. D’ailleurs c’est pour ça que les morceaux ne se ressemblent pas vraiment, les sonorités sont différentes et le mixage aussi.

12/ Pour vous cet EP se rapproche d’un album mais est-ce que vous avez envisagé de faire un album ?
Camille : C’est pas une question d'être prêts ou pas, c’est plus une question de besoin des gens. Je pense pas qu’un album soit nécessaire pour le moment.
David : Moi je me sentirais pas prêt à faire un album avant un moment en fait.
Camille : Tout à l’heure on parlait d’évolution sur l’EP, j’aimerais vraiment qu’on passe par d’autres évolutions avant de faire un album. Pour l’instant on est toujours en mode laboratoire, expérimental.

13/ Qu’est ce qu’on devrait dire à nos lecteurs pour qu’ils l’achètent ? On va déjà dire qu’il est très beau mais ensuite ?
Antoine : Bah déjà y’a des pistes différentes que sur internet.
Camille : C’est toujours plus agréable d’avoir un vinyle, c’est un objet qui a une histoire quand même.
David : Le truc c’est que si tu l’écoutes en mp3 tu peux faire d’autres trucs en même temps, alors qu’avec le vinyle tu le mets sur ta platine, tu te poses et tu l’écoutes.
Camille : Pour nous c’était naturel de choisir le vinyle, on s’est pas posés la question entre le support CD ou vinyle, on est pour le retour du vinyle. L’EP est vraiment important pour nous, on espère le partager et on sait qu’on ne pourra pas le partager autrement.

1 commentaire:

Les boutiques sonores a dit…

Holstenwall en concert dès 19H le 15 Juillet @la Station pour l'Acte II du Festival BS(p)2011 ( http://www.lesboutiquessonores.com/agenda/bsp2011-acte-ii )

entrée prévente et sur place 7€
=> http://www.digitick.com/bitter-sweet-paradise-a-p-witomsky-holstenwall-pluah-hoquets-concert-pop-rock-la-station-paris-15-juillet-2011-css4-digitick-pg101-ri892701.html

Retrouvez la programmation complète du festival en ligne sur le site
http://www.lesboutiquessonores.com/bsp2011